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Sokoine – 2017

« Tu dois continuer de rêver, souhaiter de grandes choses et poursuivre tes objectifs, car personne ne le fera à ta place »

Un an de travail depuis mon séjour à Sokoine. Des évènements ont été organisés au profit de notre association qui nous ont permis d’acheter le terrain de l’école que je vais découvrir…

J’ai préparé pour les enfants des activités à partir de la méthode Montessori, ce sera une découverte pour eux. Ils vont avoir des stylos, feutres, crayons, gommes, taille-crayons, dons de différentes personnes. Je leur ai aussi prévu des jeux comme 1,2,3 soleil, le jeu du foulard…. Tant de choses à faire avec eux, je pense que ces 2 semaines vont encore passer à une allure folle.

Samedi 11 Février, je m’envole pour Sokoine, j’ai les larmes aux yeux à l’idée de retrouver mon petit Nelson, sa famille et les autres enfants. J’arrive dimanche après-midi à Dar es Salaam, le voyage est si long… Mais je suis contente de retrouver Emma à la sortie de l’aéroport. Je vais à l’hôtel pour me reposer et demain une nouvelle journée de voyage en bus m’attend.

Lundi 13 Février, il fait très chaud, plus que l’an dernier il me semble. Emma et moi prenons un taxi pour aller à la gare routière de Dar es Salaam. Une fois sortis du taxi, comme d’habitude, nous sommes encerclés par les porteurs de bagages. Emma négocie avec l’un d’eux et nous nous rendons jusqu’à notre bus. Il y a l’air climatisé, tellement bien ! Le bus démarre, j’ai vraiment hâte d’arriver à Sokoine. Nous arrivons à Morogoro et nous devons trouver un taxi qui nous amènera jusqu’au village. Il y a des monospaces qui pourraient faire l’affaire mais nous avons tellement hâte d’arriver que nous prenons un taxi qui sera plus rapide. Le taxi entre dans le village et nous dépose juste devant la maison de la famille de Emma. Nasra, la maman de mon filleul Nelson, vient vers moi, nous pleurons de joie de nous retrouver. Je découvre son bébé, Mesiah (elle était enceinte l’an dernier lorsque j’étais à Sokoine). A mon grand bonheur il ne pleure pas en voyant la mzungu ! Nelson n’est pas là, il est en train de jouer au loin. Les autres enfants vont le chercher, il arrive en courant et me saute dans les bras. Nous sommes tellement heureux de nous revoir… Tous les enfants qui sont à proximité tirent mes 2 grosses valises jusqu’à la maison de Nelson, là où je vais vivre pendant 2 semaines. Je suis heureuse de retrouver ma famille Massaï et mon chouchou Nelson. Les hommes ne sont pas beaucoup présents dans le village car la sécheresse les oblige à aller en forêt avec leur bétail pour leur trouver à manger. C’est une année très difficile, perte de vaches, peu d’eau, peu de nourriture… Triste à voir…

Mardi 14 Février, Jérémia, un des membres de la famille, mets mes 2 valises sur sa moto et les apporte jusqu’à la classe de Lusajo. Les enfants sont prêts, nous avons bu notre chai, nous partons à l’école. Je ne connais pas encore le trajet de la nouvelle classe donc je demande à Nelson « Wapi ? (où ?) ». « Hapa » (par ici) » en me montrant le chemin. Les femmes Massaï qui sont sorties de leur nyumbani (maison) me voient et je leur dis bonjour « jambo ! ». Elles sont contentes de me revoir apparemment ! Nous marchons, je me retourne et me rends compte que plusieurs enfants nous ont rejoint sur le chemin ! Un enfant prend ma bouteille d’eau pour m’aider, un autre mon sac. Tellement serviables ces enfants, je n’ai même pas besoin de leur demander quoi que ce soit… Ils veulent tous me donner la main, ce qui rend la marche difficile ! Je rencontre des jeunes filles qui se rendent à leur école, « shikamo » me disent-elles, je leur réponds « marahaba ». A L’époque, les plus jeunes, en signe de respect envers leurs aînés, les saluaient en leur baisant les pieds et en disant « shikamo ». L’aîné les remerciait en leur disant « marahaba ». Nous arrivons dans le petit local où Lusajo et les enfants travaillent. Lusajo et moi sommes contents de nous retrouver et les enfants tellement excités de revoir la mzungu ! Je reconnais les filleuls(es) et ils sont contents que je me souvienne de leur prénom. Je me rends compte que ce local est très petit, près de la route, difficile de travailler dans de bonnes conditions. Il est vraiment temps que nous leur construisions une grande classe. Mais pour l’instant c’est mieux que rien… Je m’asseois sur un banc au milieu des enfants et Lusajo continue à donner son cours. Les enfants n’ont d’yeux que pour moi, ils me touchent les bras, les cheveux, très intriguant pour eux cette peau blanche et ces cheveux longs ! Lusajo décide donc de leur donner récréation, pas moyen de travailler ! Nous amenons mes 2 grosses valises sur le terrain qui leur sert de cour et je déballe les fournitures que je leur ai apporté. Les enfants sont euphoriques, ils n’ont jamais vu de puzzle, autant de stylos, de cordes à sauter, d’activités pour dessiner et compter…. Je leur distribue aussi des ballons et des cookies que ma maman a confectionné spécialement pour eux. Distribution de brosses à dents et de dentifrices. Lusajo veut leur apprendre l’hygiène buccale entre autre. C’est la fête !

C’est l’heure du repas, une femme, qui habite juste à côté du local, cuisine chaque jour pour les enfants. Elle nous apporte une soupe de haricots, repas quotidien des enfants… lorsque les jours sont plus fructueux ils ont droit en plus à du riz ou de l’ugali. Leur alimentation n’est pas variée du tout. Ils sont maigres mais souriants malgré tout …Nous mangeons tous ensemble, les enfants assis sur une mkeka (paillasse), lusajo et moi sur un banc. Je n’ai pas encore terminé mon assiette et je vois Malaki qui s’approche de moi… Il a encore faim, je partage mon repas avec lui en faisant semblant de manger… La journée de classe se termine, j’aide Lusajo à nettoyer la classe qui est pleine de sable. Il me raccompagne car je ne connais pas encore bien le chemin qui me mènera à la maison de mon filleul. Je retrouve Nasra, Nelson et Mesiah et passe une bonne soirée avec eux. J’offre une petite boîte à musique à mon Nelson et un hochet à Mesiah. Ils sont contents.

Mercredi 15 février 6:00 du matin, les vaches se manifestent pour la traite. Pas besoin de mettre le réveil à Sokoine ! Nasra se lève et va directement dans l’enclos pour prélever le lait dans ses calebasses. Je me lève à mon tour, les enfants, Nelson et Mesiah, dorment encore. Je vais faire une toilette. Je retourne dans la maison, Nelson est réveillé ainsi que Mesiah. Nelson s’habille et je leur donne une banane, qu’ils partagent, pour bien démarrer la journée. Ils mangent rarement le matin… Nelson est aux anges, je lui donne à boire aussi. Ce n’est pas tous les jours qu’il boit de l’eau minérale, il boit plutôt l’eau de la rivière ou de pluie mais en ce moment c’est la sécheresse, difficile de trouver de l’eau… Donc Nelson boit bien souvent du chai. 7:15, il est l’heure d’aller à l’école. Il nous faut environ 15 minutes pour aller jusqu’à la classe. Le soleil brûle déjà de bon matin. Nelson me donne la main, il ne me lâche pas une seconde, il veut être tout le temps avec moi. Je m’installe avec les enfants et Lusajo les fait travailler. Aujourd’hui séance écriture. Les enfants m’apportent leur cahier à tour de rôle et m’appellent « mwalimu ». Ils ne m’appellent plus mzungu mais maîtresse maintenant ! Ils me demandent de corriger leurs lignes d’écriture.

Récréation : Nous allons derrière la classe, à l’ombre et je leur apprends le jeu de 1, 2, 3 soleil. Pas facile au départ mais après ils se sont régalés ! Heure du repas, soupe de haricots… Une fois leur repas terminé, les enfants retournent chez eux, Nelson veut rester avec moi car il sait que quand je travaille avec Lusajo je rentre tard à la maison et il ne me voit pas beaucoup. Mais aujourd’hui je dois rendre visite aux familles de nos filleuls(es) pour me présenter et prendre plus de renseignements sur les enfants et faire quelques photos. Nelson rentre à la maison en boudant… J’aimerai moi aussi rester avec lui mais je n’ai pas le choix. Lusajo et moi marchons dans le sable sous un soleil de plomb. J’utilise mon parapluie pour me protéger du soleil car ma peau est déjà brûlée. Nous arrivons chez la première famille et nous nous asseyons à l’ombre déjà épuisés… Je commence à parler aux parents, Lusajo fait la traduction. Je veux mettre les choses au clair, tout le monde pense que je suis riche. Donc je leur explique que ce n’est pas moi qui parraine tous les enfants, l’argent ne vient pas de moi mais de divers évènements que nous organisons en France et de quelques parrainages. Je leur explique que si j’étais riche je ne laisserai pas les enfants dans ce si petit local et que l’école serait déjà construite… Le message est bien passé. Les parents sont reconnaissants de ce que nous faisons pour leurs enfants et remercient les parrains-marraines. Sans notre aide, leurs enfants ne pourraient pas aller à l’école. La plupart des parents ne travaillent pas, la cause est bien souvent la maladie, un handicap… Ou bien ils travaillent mais les revenus ne sont pas suffisants. Ils sont ravis à l’idée que les parrains-marraines puissent venir leur rendre visite. Sachez que vous serez les bienvenus ! Nous continuons notre visite dans les familles, pour aujourd’hui nous nous arrêterons à la 5e famille, il fait trop chaud…Nous rentrons, la nuit tombe, les enfants jouent dehors. L’air est plus frais, ça fait du bien. Fatigués de leur journée, les enfants s’endorment plus tard dehors sur la mkeka. Ils ont attendu le repas mais n’ont pas pu lutter contre la fatigue… Nasra est en train de cuisiner. Je trouve ça triste car elle cuisine trop tard, les enfants sont épuisés et s’endorment avant le repas. Ils auraient besoin d’un repas supplémentaire dans la journée. Mais Nasra est tellement occupée dans la journée. Traite des vaches, s’occuper du bébé, aller chercher de l’eau à la rivière, laver la vaisselle, le linge…. une fois la nuit tombée elle cuisine… Elle utilise les épices que je lui ai amené (persillade et raz el hanout). Elle adore ce nouveau goût ! Les femmes Massaïs qui entre dans la maison disent que ça sent très bon.Nous nous couchons, nous sommes 4 dans un même lit, Nasra, Mesiah, Nelson et moi, parfois 5 quand un autre enfant nous rejoint. Dans la nuit j’entends du bruit dans la maison. C’est un chat qui cherche à manger. Il fait trop chaud dans la maison, impossible de dormir, je manque d’air…

Jeudi 16 Février, réveil par les vaches comme à l’accoutumée ! Même rituel, Nasra se lève, moi aussi, les enfants dorment encore. Je vais me préparer. Aujourd’hui je vais à Morogoro avec Lusajo pour acheter une grosse marmite pour cuisiner des pâtes pour les enfants, des gobelets et assiettes en plastique. Nous allons aussi acheter quelques légumes, chou, tomates, mini poivrons. Je veux offrir un repas varié aux petits… Lusajo en profitera pour acheter de nouveaux cahiers avec l’argent de MtotoSchool. Nous sommes chargés, fatigués par la chaleur et nous commençons à avoir faim. Lusajo me propose de prendre un dala dala et d’aller rendre visite à sa soeur qui vit à Morogoro. En Afrique les gens sont très accueillants. On peut arriver à n’importe quelle heure de la journée, ils nous offrent un repas avec un grand sourire… Soupe de haricots, riz et un peu de viande. Je remercie la soeur de Lusajo pour son accueil et nous reprenons un dala-dala pour retourner à la gare routière afin d’y trouver un taxi pour retourner à Sokoine.

Vendredi 17 Février, Nasra semble malade mais elle se lève tout de même pour la traite. Beaucoup de personnes sont malades ici, maux de tête, rhume et toux, les enfants aussi. Le temps se rafraîchit la nuit car la saison des pluies devrait commencer. J’ai eu la bonne idée d’apporter quelques médicaments, paracétamol, sirop pour les enfants et du thym pour tisanes et fumigation… Je donne une banane et un cake à Nelson et Mesiah. Je tiens à ce qu’ils mangent quelque chose le matin… Nelson me suit pour faire un brin de toilette, il apprécie de se débarbouiller avec la douche (pocket shower) que j’ai apporté. Je lui montre comment il doit se brosser les dents. Mesiah quant à lui, attend sagement sur le lit que sa maman vienne le chercher. Il est l’heure d’aller à l’école, Nemburissi part le ventre vide car elle s’est réveillée en retard… Nous arrivons à l’école, les enfants sont collés à moi. Ils aiment que je leur caresse la tête et que je leur fasse des bisous. Je pense que ça ne leur arrive pas tous les jours… Une petite fille, Moita, pleure. Je demande à Lusajo ce qu’il lui arrive, il me dit qu’elle a faim. Ca me fend le coeur de voir ça… Elle n’est pas la seule à venir le ventre vide à l’école. L’école est un moyen pour eux d’avoir au moins un repas dans la journée. Je me sens honteuse de ne pas pouvoir distribuer les bananes et gâteaux que j’ai à la maison mais je ne peux pas satisfaire tout le monde… J’aide tant bien que mal mon filleul et son frère mais impossible d’aider tous les enfants du village… Aujourd’hui activité puzzle, les enfants doivent retrouver la lettre qui correspond à un mot. Ils sont contents de travailler de façon ludique. Le problème est qu’il n’y a pas assez de place dans cette pièce pour travailler correctement. Nous avons 15 enfants parrainés mais Lusajo, qui a un grand coeur, ne peut s’empêcher d’accueillir beaucoup plus d’enfants… Nous nous mettons d’accord sur le fait qu’il est nécessaire de réduire le nombre d’élèves s’il veut leur offrir un enseignement de qualité et profiter du matériel que je leur ai apporté. Nous avons donc organisé une rencontre avec les parents des enfants en leur expliquant qu’il est préférable que les enfants non parrainés restent chez eux en attendant qu’on leur trouve un parrain ou une marraine car le but de MtotoSchool est d’offrir un enseignement de qualité aux enfants. Les parents comprennent très bien notre message et sont contents de voir que nous voulons le meilleur pour leurs enfants. Une fois la classe terminée nous rendons visite aux 10 autres familles, nous sommes fatigués mais contents d’avoir terminé notre travail. Nous croisons un Massaï, Franky, il me fait comprendre qu’il est enrhumé et a mal à la tête. Je lui apporte plus tard du thym et lui explique comment faire une tisane et une fumigation. Je lui donne du paracétamol. 2 jours après il vient me voir pour me remercier car il est guéri. Eh oui, j’ai fait l’infirmière aussi !!

Samedi 18 Février, grand nettoyage de la classe avec Lusajo. Je range correctement tous les accessoires et fournitures que j’ai apporté, stylos, feutres, crayons, ciseaux dans des bouteilles en plastique. Je confectionne des bouteilles sensorielles avec de l’eau, des perles, des paillettes, des plumes… J’ai installé une petite étagère en tissu pour y mettre les activités que j’ai créé. Une belle petite classe ! Maintenant repos, je profite un peu de ma famille Massaï et des enfants. J’ai besoin d’acheter de l’eau fraîche. Je pars donc à pieds avec Nelson, il me montre le chemin car je ne sais pas où se trouve la boutique. Nelson est fier de me guider. Nous marchons depuis 20 minutes et nous arrivons enfin à la boutique. Je prends mes 2 bouteilles d’eau bien fraîches et je demande à Nelson ce qu’il veut boire. Il a envie d’un soda bien frais. Nous nous asseyons pour déguster notre boisson, Nelson est content. Il aime être seul avec moi. Je commence à connaître plusieurs mots en swahili et nous commençons à communiquer plus facilement et ça c’est génial. J’espère que l’an prochain je serai capable de faire des phrases. Nelson a terminé son soda, nous repartons pour la maison. Un Massaï du village qui est en moto nous voit et nous propose de nous ramener. Nous voilà donc sur la moto, le Massaï, Nelson et moi ! Au bout de 5 minutes je me rends compte que Nelson me voit dans le rétroviseur et me fait des grimaces, il est heureux et ça me fait chaud au coeur. Nous arrivons à la maison, Nasra est occupée. Je lui propose de doucher les enfants avec ma pocket shower. Ils sont ravis ! C’est la première fois qu’ils se lavent de cette manière, ça les amuse énormément ! La nuit tombe et nous apprenons que Jérémia, un des membres de la famille a été mis en prison car ses vaches ont mangé le potager d’un fermier… Les membres de la famille doivent se cotiser pour indemniser le fermier. Jérémia sortira de prison le lendemain. Ce problème est courant, les fermiers empiètent de plus en plus sur le terrain pastoral et il est difficile pour les Massaïs de maîtriser le bétail… Le lendemain, même chose, le boy de la famille s’est fait battre par un fermier pour la même raison… J’utilise la crème arnica pour le soulager car sa jambe est enflée à cause des coups de bâtons. Il n’arrête pas de me dire « asante Sandrine » (merci). Dure la vie de Massaï… La sécheresse rend déjà la vie difficile pour que les vaches s’alimentent mais en plus de cela, ce peuple doivent faire attention aux plantations des fermiers… Une petite fille qui habite à côté de chez Nelson vient nous voir, c’est Moinan. Elle porte un bébé sur son dos. C’est une chose très courante, une fois l’école finie, les filles font le ménage, le repas pour la famille et s’occupent des enfants. Ce bébé est handicapé. Il a manqué d’oxygène à la naissance et a un pied sectionné… Quel malheur… Ce soir il fait très chaud, trop chaud. Les femmes ont prié pour que Dieu leur apporte la pluie. L’eau dans la rivière devient rare. Plus d’eau pour boire, pour la douche ou pour laver la vaisselle et linge. Les vaches ont piétiné le peu d’eau qu’il restait dans la rivière. Ça devient grave… Nous sommes allongées à l’ombre d’un arbre sur une mkeka (paillasse), Nelson me dit « maji », il veut de l’eau. Je vais chercher ma bouteille et il boit à n’en plus pouvoir… Je leur cuit des bananes trop mûres avec du sucre, ils se régalent.

Dimanche 19 Février, une belle journée s’annonce pour les élèves ! Nous allons leur préparer un bon repas.

7:30, préparation des légumes pour une cinquantaine d’enfants, riz pilau, pâtes, haricots et choux. Je trie le riz, ce qui prends un certain temps. C’est l’excitation pour les enfants mais aussi pour les gens du village. Ils demandent si eux aussi peuvent profiter du repas. Nous leur disons que s’il reste de la nourriture, ils pourront en manger. Mais d’abord les enfants…

12:30, préparation du repas terminée. Nous servons les enfants. Ils sont contents de manger des pâtes et des légumes. Je suis heureuse mais triste à la fois de voir tous ces enfants impatients de manger. Je réalise à quel point il est urgent de les aider… Je ne vois que des sourires autour de moi. C’est la fête pour eux ! Une fois le repas terminé, les enfants rentrent chez eux et racontent à leurs parents qu’ils ont mangé en grande quantité… Les Massaïs mangent dès que possible. Même si les enfants ont eu un gros repas, ils sont capables de manger à nouveau deux heures plus tard. Ils sont tellement en manque de nourriture qu’ils « stockent » au maximum. Ils sont heureux de voir leur ventre rebondi… Journée terminée, Lusajo et moi nettoyons la vaisselle et les déchets laissés par les enfants. Nous rentrons à la maison, Nasra est malade. Elle a mal de partout et à la poitrine. Elle pense que c’est la malaria… La nuit va tomber, j’aimerai laver les enfants. Lusajo m’aide en gardant le bébé dans ses bras et je vais avec les plus grands chercher de l’eau dans le bassin près de la maison. Les enfants descendent dans le bassin et commencent à prendre de l’eau dans les seaux. Je me rends compte que l’eau est boueuse et ne sent pas bon… Je dis aux enfants d’arrêter, il n’est pas question d’utiliser cette eau ! Je me sens désespérée tout à coup, Nasra malade, pas d’eau pour cuisiner, pas d’eau pour se laver… Mais pourquoi leur vie est si dure ???!!!! Ils ne méritent pas ça, personne ne mérite ça…. J’utilise mes lingettes pour rafraîchir les enfants et me mets à pleurer, c’est trop injuste… Lusajo me prie d’arrêter de pleurer. Il me dit que pour moi ce n’est pas normal mais ici, en Tanzanie, cette situation est normale… Je vais donner du paracétamol à Nasra et lui faire une tisane de thym. Je ne prendrais pas de douche ce soir, pourtant j’en rêvais après cette grosse journée… Je vais me coucher sans manger, pas le moral et fatiguée. Nasra est fiévreuse donc je préfère dormir dehors devant la maison sur une mkeka pour la laisser tranquille et ne pas être malade à mon tour. Elle peut avoir besoin de moi pour s’occuper des enfants.

Je dors donc à la belle étoile. Je n’ai jamais vu un ciel aussi étoilé. J’ai pu voir 3 étoiles filantes en une nuit ! Edward passe à la maison quelques instants pour repartir dans la forêt avec les vaches. Il me demande si je n’ai pas peur de dormir dehors toute seule. Non je n’ai pas peur, je me sens bien… Le tonnerre gronde cette nuit. Je me mets à espérer que la pluie tombe et je me dis qu’il serait bien de faire un puits à Sokoine pour tous les villageois…

Lundi 20 Février, Lusajo et moi allons à Morogoro pour finaliser les achats pour la classe. Avant de partir je prends mon shampoing et mon savon et je profite d’être en ville pour aller dans un guest house et prendre une bonne douche…

Mardi 21 Février, les enfants découvrent le nouvel agencement de la classe et les fournitures rangées dans le meuble. Ils sont heureux. Ils s’amusent avec les bouteilles sensorielles. Les paillettes brillent au soleil, c’est fascinant pour ces enfants ! Aujourd’hui Lusajo leur montre comment se laver les dents.

En quelques minutes un grand vent se lève sur Sokoine, le ciel devient menaçant et nous sentons la pluie arriver. Tout à coup c’est le déluge. Je sors sous la pluie et me frotte les bras et le visage encrassés par ce sable qui colle à la peau ! Quel bonheur ! haha ! Je n’ai jamais été aussi contente de voir la pluie !

Journée terminée, je rentre à la maison. Nasra va mieux. Elle a récupéré l’eau de pluie dans les seaux, ce soir douche ! Les enfants s’endorment tôt ce soir. Je cuisine des pâtes pour Nasra (elle en rêve). La pluie tombe à nouveau. Des Massaïs qui étaient aux alentours entrent dans la maison pour se protéger de la pluie, « hodi » disent-ils (je peux entrer ?), « karibu » répond Nasra (vous êtes les bienvenus). Et nous voilà une dizaine de personnes dans cette petite maison, attendant que la pluie cesse ! Nous partageons notre repas avec eux.

Mercredi 22 Février, nous allons découvrir notre terrain. Nous empruntons un petit chemin pour y aller. Nous passons devant un énorme baobab, lieu où les Massaïs se retrouvent pour leurs meetings. Nous arrivons sur notre terrain, il est gigantesque ! Je ne l’imaginais pas aussi grand. Les enfants sont heureux de découvrir l’endroit de leur future école, ils courent de partout ! Je pleure de joie, ce terrain représente beaucoup de travail, l’énergie que nous avons tous déployé pendant toute une année. Je pense aux membres de MtotoSchool mais aussi aux parrains-marraines, donateurs… Sans vous tous nous n’en serions pas là… Ce terrain attend maintenant son école et nous devons agir le plus rapidement possible. Retour à la maison. Je rejoins Nasra et les autres femmes Massaïs sur une mkeka pour me reposer. Nasra me propose un chai que j’accepte volontiers.

Préparation du chai : gingembre pilé dans de l’eau bouillante. Ajouter un sachet de thé dans cette eau. Une fois infusé, mélanger avec un peu de lait. Un délice !

Les enfants jouent à côté de nous. Une des femmes me montre le bout des doigts de la petite Nemburissi. Ils sont blancs et un peu fripés. Je lui dit qu’elle a sûrement joué un petit moment dans l’eau et voilà le résultat. En fait, ce n’est pas du tout ça…. Nasra m’explique que Nemburissi ne se lave pas les mains lorsqu’elle a fini de manger. Et la nuit, pendant son sommeil… les rats viennent lui grignoter le bout des doigts !… Les rats ???!!! J’ai cru que j’allais tourner de l’oeil ! Nasra me dit « oui tu ne les vois pas la nuit ? ». Non je ne les vois pas et j’espère ne pas les voir ! Je dis à Nasra qu’il faut qu’elle apprenne la propreté à Nemburissi, elle peut attraper des maladies à cause des rats…

Jeudi 23 Février, dernier jour avec mes petits watoto… Les enfants ne veulent pas que je parte et Nelson encore moins… J’ai écrit un petit mot à mon Nelson et je demande à Lusajo de lui traduire en swahili. Je veux lui expliquer que je ne l’abandonne pas, qu’il doit aller à l’école tous les jours pour avoir un bon niveau scolaire et plus tard pouvoir avoir un bon travail, s’acheter à manger, des médicaments, des vêtements et aider sa maman. Nous sommes tristes… Je me souviens d’une conversation avec Nasra qui me disait qu’elle serait d’accord si je voulais prendre Nelson avec moi. Je lui réponds qu’il n’est pas question que je lui prenne son fils ! Elle me dit que Nelson est assez grand et que si ça peut lui apporter une meilleure vie, pourquoi pas ? Je lui réponds que j’aiderai Nelson aussi bien que possible mais jamais je ne l’enlèverai de sa famille, même si j’adore mon filleul… C’est la fin de ma dernière journée à Sokoine, je joue une dernière fois avec les enfants. Je prépare ma valise. Une des valises a une roue cassée. Je décide de la donner à Nelson pour qu’il puisse y ranger ses habits. Nous trions son linge qui est mélangé avec celui de ses parents et le rangeons dans sa nouvelle valise. Il est très content et très fier. J’en profite pour y glisser un paquet de gâteaux et lui fait un clin d’oeil. Grand sourire de mon Nelson. Il pleut à nouveau au grand bonheur de tous. La saison des pluies démarre enfin. La rivière se remplit d’un coup et les enfants et moi sortons pour suivre le cour d’eau. Nous sommes contents de voir à nouveau toute cette eau… Je pars donc de Sokoine rassurée. La vie leur sera peut-être un peu plus douce pendant quelques mois…

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Février 2018

« Le chemin de la réussite n'est pas une ligne droite»

 

Mon récit de février 2018 :

Le voyage pour la Tanzanie approche à grand pas. Cette année, je ne pars pas seule. Cinq personnes vont m’accompagner, deux membres-marraines, un bénévole et deux parrains pour inaugurer notre 1ère classe et rencontrer les enfants ainsi que notre équipe de Sokoine et participer sur place à notre projet.

Préparation des valises… nous sommes limités en poids et le choix de ce que nous allons apporter est difficile car nous recevons beaucoup de dons (fournitures scolaires, peluches, jeux, ballons…). Nous emmenerons quelques 300 kilos pour les enfants et pour l’école.

Ce voyage va être une nouvelle expérience pour moi, je vais partager mon univers Massaï.

Nous sommes tous impatients de découvrir la classe que nous avons réussi à construire ainsi que l’environnement (mes accompagnants vont aussi découvrir le terrain que nous avons acheté).

Ces personnes vont rencontrer leurs filleuls (es), un grand moment en perspective….

Les enfants nous attendent avec impatience, ils savent que cette année il y aura beaucoup plus de « zawadi » (cadeaux) que d’habitude ! Les enfants qui vont rencontrer leur marraine – parrain sont très excités. Jacqueline et moi ferons aussi le relais pour certains enfants dont les parrains-marraines nous ont confié cadeaux ou autres messages.

Samedi 24 février : Nous décollons pour un long voyage. L’excitation est au maximum ! Nous arriverons demain en début d’après-midi à Dar es Salaam et ferons une halte à l’hôtel pour une nuit et reprendrons le voyage lundi matin en bus la majeure partie du temps.

Dimanche 25 février : Dar es Salaam et sa chaleur moite… Quel plaisir pour moi de me sentir ici… Après les formalités à la douane de l’aéroport nous allons au bureau de change. Nous retrouvons ensuite Emma et les deux taxis de l’hôtel où nous allons passer la nuit avant d’entamer notre voyage pour Sokoine. Nous chargeons tous les bagages dans un taxi et nous installons dans le deuxième. Durant le trajet, mes yeux sont rivés sur les abords de la route, rien ne doit m’échapper, la Tanzanie me manque tellement quand je suis en France… Les femmes avec leurs beaux habits colorés, les enfants qui nous regardent avec leurs grands yeux étonnés, cette vie si différente…

Nous arrivons à l’hôtel où nous sommes très bien reçus, comme d’habitude. Une bonne nuit de repos pour bien repartir demain matin !

Lundi 26 Février : Nous chargeons à nouveau nos bagages dans les deux taxis de l’hôtel pour aller à la gare routière de Dar es Salaam et prendre un bus pour nous rendre à Morogoro et ensuite deux taxis pour Sokoine. Un trajet qui va durer 6-7 heures… Dernier parcours avec le taxi, nous démarrons de Morogoro et les larmes me viennent en pensant aux enfants, à notre classe, je suis tellement impatiente d’être arrivée… Cela fait pratiquement un an que je suis l’évolution de la construction à partir de photos, vidéos et j’ai besoin d’être sur place pour réaliser le travail que nous avons accompli.

Avant d’aller au guest house, le taxi nous amène directement à l’école. Sur le passage, je montre aux personnes qui m’accompagnent, l’ancien local où les enfants étaient l’an dernier et tout le monde réalise combien ce local était petit pour tous les enfants….

Nous arrivons à l’école, le bleu des façades se fond avec ce beau ciel de Tanzanie, un gigantesque baobab domine notre école, que c’est beau… Il n’y a personne dehors juste le grand silence de l’émotion, les enfants sont dans la classe. Je ne peux plus attendre et entre dans la classe. Mes accompagnants comprennent que je peux avoir ce privilège d’être la première à entrer dans notre classe. Les enfants travaillent avec Lusajo et Ritah. Je les regarde et me mets à pleurer, en retour ils m’envoient des baisers et m’appellent « Sandrine ! Sandrine ! ». Mon filleul, Nelson, fait le timide mais affiche un grand sourire, un an que nous attendons de nous revoir…. Je sors de la classe et invite tout le monde à entrer dans la classe. Ils sont aussi intimidés que les enfants. Très émouvant de se retrouver face à tous ces petits, les yeux grands écarquillés, qui étaient si impatients de nous rencontrer. Chaque personne se présente aux enfants et ceux-ci entament une chanson de bienvenue.

Chaque parrain marraine communique ensuite avec son filleul avec l’aide de Lusajo. Les filleuls sont intimidés, pour certains c’est la première fois qu’ils voient des mzungu.

Nous sortons tous ensemble de la classe pour une récréation sur notre grand terrain arboré et nous familiariser avec les enfants. Des enfants non scolarisés viennent également à notre rencontre ainsi que des Massaïs. Je visite le bureau, les sanitaires. Ça fait du bien d’être sur place et de voir l’aboutissement de tant d’efforts… Le réservoir d’eau que nous avons installé est un pur bonheur pour les enfants, ils peuvent boire à volonté. Le petit coin cuisine que notre équipe de Sokoine a installé est bien pratique, il faudra peut-être ajouter un toit de tôle pour la saison des pluies… Je me mets en retrait et regarde tous ces enfants qui ont l’air si heureux ici. Notre école est jolie près du baobab. Je suis satisfaite de ce que l’on a réussi à faire. 

Il est tard, nous sommes fatigués de notre voyage, nous allons donc au guest house, qui se situe à 10 minutes de Sokoine, pour y déposer le reste de nos bagages et allons dans un petit restaurant pour manger au son d’une musique africaine.  

Mardi 27 Février : Il est 6:30, Edward vient me chercher en moto pour que j’aille dire bonjour à sa famille avant d’aller à l’école. Je suis tellement contente de revoir Mama que je n’ai pas vue l’an dernier ! Nelson, mon filleul, est ravi que je sois là de bon matin, d’autant plus que j’ai apporté des bananes et mandazi (beignets) pour le petit déjeuner. Les enfants mangent et Mesiah, petit frère de Nelson, pleure car il a peur de la mzungu, il ne se rappelle pas de moi, il était encore bébé l’an dernier…

Il est 7:15, l’heure d’aller à l’école. Nous partons tous ensemble comme d’habitude et les enfants se chamaillent pour me donner la main.

Les enfants entrent en classe pour travailler. Jacqueline et moi ouvrons les valises pour trier le matériel qui a été collecté. Edward est admiratif devant tant de cadeaux. 

9:30, c’est l’heure du petit déjeuner pour les petitous. Edward a préparé le porridge. Chaque enfant prend son gobelet et la cuisinière leur sert leur repas.

Ils sortent ensuite dans la cour et nous leur donnons un des ballons de foot qui nous ont été offerts. Les Massaïs adorent le foot, imaginez donc leur joie lorsqu’ils voient le ballon !

Emma arrive avec une petite camionnette qui nous livre nos vivres pour 5 jours (fruits, légumes, pain, confiture, riz, pâtes, bouteilles d’eau, et une natte…). Nous partagerons, bien entendu et comme convenu, notre repas avec les cuisinières et notre équipe de Sokoine qui sont soucieux de nous accueillir dans les meilleurs conditions possibles. 

10:30, notre petit déjeuner est prêt. Chai (lait + thé + sucre + gingembre) avec des tartines de pain à la margarine et confiture, des bananes plantain frites, des bananes (fruit) et de l’ananas. Que demander de plus ! Nous mangeons dans le bureau et de temps en temps nous voyons des petites têtes curieuses dans l’entrebâillement de la porte ! 

La classe étant libre, nous commençons à installer les fournitures scolaires, accrocher les décorations sur les murs, un dessin d’une petite fille qui a voulu faire plaisir aux élèves, des peluches récoltées par une école, les livres de Marie Tibi… C’est Noël avant l’heure à Sokoine !

Nous partons ensuite visiter quelques familles d’enfants parrainés. Les parents sont heureux de rencontrer les parrains et marraines et les remercient chaleureusement pour leur aide. Nous sommes parfois invités à rester manger chez eux.

Fin de journée, Edward nous ramène, Jacqueline et moi, au guest house en moto. A trois sur la moto, cheveux aux vents, haha ! Quelle aventure ! Edward a besoin de faire le plein de sa moto. Mais je n’ai pas vu de station essence par ici…. Edward s’arrête au bord de la route, un homme est là, à côté de lui une étagère avec plusieurs bouteilles d’eau minérale remplies d’essence ! Eh oui ! Hors de la ville le plein se fait avec de petites bouteilles d’eau minérale car il n’y a pas de station essence ! Ah l’Afrique… j’adore ! Pour information, le prix au litre est de 93 cts… Ce qui est assez cher pour la population rurale dont le salaire moyen est de 80€… Le carburant est acheté au compte goutte, juste pour les kilomètres à effectuer.

Mercredi 28 Février : Edward vient à nouveau me chercher à 6:30 car je veux apporter des cadeaux à ma famille Massaï. Nasra est contente car je lui ai apporté des épices, des broches pour attacher ses shukas (tissu massaï). Nelson et Mesiah reçoivent des vêtements, couvertures et autres surprises…

Je rencontre une maman d’un de nos filleuls qui est fière de me montrer le mouton qu’elle a pu acheter avec le don de la marraine de son fils. Les parents sont très reconnaissants de l’aide que nous apportons à leurs enfants.

En fin de matinée, nous sommes quelques-uns du groupe à aller à Morogoro. Il faut que j’achète les cadeaux que m’ont commandé quelques parrains et marraines. Nous en profitons pour nous promener un peu et je découvre les quartiers chics de Morogoro, quartiers des mzungus. Très bel endroit. J’ai aperçu des femmes qui façonnaient de la terre. Emma me dit qu’il s’agit du kaolin, une roche calcaire très consommée par les femmes africaines, surtout lorsqu’elles sont enceintes (apport en fer, calcium…).

Jeudi 1 Mars : Aujourd’hui il pleut, nous sommes déçues car nous avions, Jacqueline et moi, prévu des jeux à l’extérieur… Nous restons donc dans la classe et distribuons aux enfants des petits savons que la savonnerie Rampal de Salon nous a gentiment offert, des ballons gonflables, des peluches que nous avons rapportées (merci Audrey et Anne-Marie). Les enfants sont tellement excités d’avoir ces peluches dans leur classe et rient aux éclats ! Ils sont aussi très heureux de rester en classe, c’est une forme de récréation car nous les laissons s’exprimer au tableau, dessiner, chanter, danser. Jacqueline aime observer les petits écoliers, certains ont sans doute déjà quelques vocations !

Petite réunion avec Emma et Edward (Emma, président de Mtoto School Support Group et Edward membre). Ils me soumettent les besoins les plus urgents pour l’école : mettre des fenêtres au bureau et à la classe pour protéger l’intérieur des intempéries et des regards, clôturer l’école pour éviter les va-et-vient incessants (vaches, chèvres et petits curieux…) et poser l’électricité. Nous optons pour l’électricité, qui entre dans nos tarifs. Nous allons donc acheter un panneau solaire avec une batterie qui alimentera le bureau, la classe et les sanitaires. Quelques Massaïs participent à l’installation de l’électricité, ainsi que les enfants le deuxième jour ! Jacqueline et moi rebouchons la tranchée qui a été faite jusqu’aux sanitaires et les enfants nous aident à damer la terre qui rebouche cette tranchée. Me voilà donc avec les enfants, en file indienne, en train de taper des pieds pour damer la terre ! Nous les récompensons en leur donnant une sucette ! Nous aidons l’artisan à poser les lumières et le travail se fait rapidement. En cet fin d’après-midi il y a beaucoup de monde sur le terrain, une belle ambiance y règne. La nuit tombe et tout à coup… la lumière fût !!!

Nous sommes heureux de voir notre école éclairée en pleine nuit. Maintenant Emma et Edward sont rassurés car l’école sera un peu plus en sécurité la nuit. Nous avons un Massaï qui surveille l’école la nuit pour éviter les vols et destructions et Edward le relaie quelques jours dans la semaine.

Vendredi 2 Mars : Une nouvelle journée à l’école commence sous un beau soleil. Il va faire chaud aujourd’hui… Nous avons apporté des activités ludiques pour les enfants (puzzles avec chiffres, lettres, cubes, livres…). Jacqueline et moi montrons à Ritah et Lusajo qu’il est possible de faire travailler tous les enfants en même temps (petite section, moyenne section et grande section). Lorsque les grands font des calculs sur leur cahier, les petits peuvent travailler en groupe sur le tapis avec les bouliers et puzzles avec les chiffres. Les petits sont ravis de travailler de façon ludique et ils comprennent vite !

C’est l’heure du breakfast ! Les enfants sortent leur timbale pour manger leur porridge. Ensuite jeux extérieurs… Marrelle, cloche pieds, bulles de savon, foot pour les garçons.

En début d’après-midi, nous partons, Lusajo, Jacqueline et moi, visiter quelques familles. Vous souvenez-vous du pasteur de Sokoine ?? Cet homme qui a exclu Lusajo et les enfants de son église par jalousie ?… Eh bien, à ma grande surprise, je découvre qu’une des filleules est la petite fille du pasteur ! Incroyable… Lusajo me sourit et me dit que l’équipe de Sokoine préférait que j’apprenne cette nouvelle sur place, craignant une réaction négative de ma part. Il n’y a aucun soucis pour moi, cette petite fille est si attachante et malgré tous les déboires engendrés à cause de cette exclusion je tiens à montrer au pasteur que nous ne sommes pas rancuniers et que tout enfant est le bienvenu chez MtotoSchool. Je pense qu’il n’était pas très fier lorsque je suis arrivée chez lui ! Tout s’est bien passé entre nous et la petitoune était très contente des cadeaux offerts par son parrain et sa marraine.

Au retour, nous passons chez mon Nelson car Jacqueline souhaite commander des bijoux à la Mama. J’en profite pour lui faire visiter mon petit paradis, si paisible. Elle comprend et partage ce que je ressens lorsque je suis ici… Les vaches, les chèvres, les poules, les enfants et aucun bruit…

Nous retournons à l’école, nous avons encore du temps devant nous. Nous décidons toutes les deux de nettoyer le terrain. Il y a des bouteilles et sachets plastiques dans les branchages. Au boulot, sous un soleil de plomb !… Nous faisons un tas de déchets et brûlons le tout une fois notre travail terminé. Les enfants sont tous là et nous en profitons pour leur faire comprendre qu’il ne faut pas jeter n’importe quoi sur le terrain, nous leur montrons donc l’endroit où il faudra déposer les déchets. Nous les observons par la suite et nous voyons qu’ils vont d’eux-même jeter les déchets à l’endroit prévu. Pourvu que ça dure !!!…

Samedi 3 Mars : C’est le jour du Massaï Market. Il se situe à quelques kilomètres de Sokoine. C’est un très grand marché où l’on trouve de tout. Shuka (tissus Massaïs aux couleurs éclatantes), perles, bijoux, couteaux, tabac à priser, vêtements, légumes, fruits, viande… Nous nous promenons dans le marché et en profitons, Jacqueline et moi, pour acheter l’artisanat local que nous partagerons en France. Nous suivons ensuite Emma pour prendre notre repas. Nous nous installons sous une petite cabane végétale, on nous apporte une bonne pièce de boeuf sur un feuillage que les Massaïs découpent en fines tranches avec leur couteau. C’est un délice ! Une fois notre repas terminé, une femme passe avec un seau rempli de miel. Dans le seau il y a encore les abeilles et les alvéoles, rien de plus naturel ! Nous goûtons le miel et sommes conquises, Jacqueline et moi, et en achetons.

Nous nous rendons ensuite à l’endroit où les Massaïs vendent leurs bétails. Un terrain immense, avec des vaches et des chèvres à perte de vue. 

Dimanche 4 Mars : Jour de repos. Je vais enfin passer une journée entière chez mon chouchou ! Jacqueline va chercher sa filleule et me rejoint chez Nelson pour que l’on passe la journée ensemble. Nous avons apporté des bananes, des biscuits et chapatis. 

Beaucoup d’enfants nous rejoignent pour profiter de notre présence.

Jacqueline a apporté du papier et des feutres et nous installons les enfants sur une natte pour qu’ils dessinent. Ils adorent ça. Ce n’est pas tous les jours qu’ils ont le loisir de dessiner… Besoin de se défouler après ce moment tranquille, nous sortons les raquettes et ballons. Tous les enfants jouent et c’est le bonheur chez Nelson. Jacqueline apprend aux filles comment jouer à la marelle.

Les chèvres commencent à s’agiter, il est l’heure pour elles d’aller dans la forêt pour manger. Les femmes séparent les petits de leurs mamans pour les garder en sécurité à la maison. Les chevreaux bêlent à n’en plus finir en voyant leurs mamans partir… Nasra prépare le repas, des pâtes avec des légumes et elle choisit une belle poule pour nous. L’an dernier je lui avais acheté 3 poules et cette année elle est fière de me montrer toutes les poules qu’elle a (une vingtaine) ainsi que les oeufs. Je suis contente et fière d’elle. Je réalise combien mon aide pour mon filleul leur est précieuse… Les enfants se régalent des pâtes, ce n’est pas tous les jours qu’ils en mangent…

La nuit tombe, nous devons ramener Nashumu chez elle et retourner à l’école pour retrouver notre taxi, Edward.

Lundi 5 Mars : Aujourd’hui nous avons envie de mélanger du chocolat venant des Antilles dans le porridge des enfants. Ils n’aiment pas vraiment car le chocolat est pur et dépourvu en sucre… Nous ferons mieux la prochaine fois ! Par la suite nous commanderons du lait pour faire déguster un bon chocolat chaud bien sucré.

Une fois que les enfants jouent à l’extérieur, j’en profite pour balayer la classe et ranger correctement les fournitures à leur place. 

Mardi 6 Mars : Aujourd’hui, journée festive ! Nous avons prévu de faire de la purée et des pop corns à nos petitous ! Emma demandent aux enfants de se mettre en file indienne pour la distribution des pop corn. Asante ! Asante ! (merci ! merci !). Ils adorent, ils ont une petite moustache de sucre et en redemande encore et encore !

Jacqueline et moi leur avons prévu des jeux collectifs, colin maillard, course de sacs, foot… Les enfants sont insatiables, ils veulent jouer, jouer et encore jouer malgré la chaleur ! 

Mercredi 7 Mars : Nous avons organisé une fête Massaï . Cette cérémonie consiste en premier lieu à tuer une chèvre pour notre repas. Nous assistons au rituel. La chèvre est pendue pour que la viande soit la plus tendre possible. Ensuite les Massaïs la dépèce et retirent les organes un à un, délicatement. Cela prend beaucoup de temps. Tout est fait proprement sur un lit de feuilles. Aucun organe n’est jeté. Tout est utilisé. Il est bien connu que les Massaïs boivent du sang… Je suis curieuse de tout et je me dis que je ne dois pas mourir bête !… Donc j’accepte de goûter une gorgée de sang ! A ma grande surprise ce n’est pas si mauvais que ça. Ça a plutôt le goût du foie et c’est épais, le goût reste en bouche pendant un certain temps même en ayant bu de l’eau tout de suite après. Je goûte aussi 2 petits morceaux de foie cru, très bon ! Les hommes et la Mama sont très heureux et me disent que maintenant je suis une pure Massaï. Vous pouvez imaginer mon émotion…  

Une fois que la viande est prête, un Massaï prépare la cuisson. La viande est piquée sur des bâtons dans la terre au dessus du feu et va cuire lentement pendant quelques heures. 

Les hommes mangent à quelques mètres de nous, ils ont pour habitude de manger entre eux.

Nous sommes assis sur une natte, sous le baobab vieux de 400 ans. Cet arbre est le lieu où les Massaïs se réunissent pour parler ou débattre sur différents sujets. Nous mangeons la viande qui est un délice. Quelques hommes passent près de nous et je fais la remarque à Emma qu’ils ont l’odeur du lait car ils en boivent énormément. Nous demandons ce que les Massaïs sentent lorsqu’ils sont prêt de nous. Ils sentent un doux parfum huilé et ils aiment bien. De nouveaux Massaïs arrivent au loin pour participer à la fête. Leur démarche lente et majestueuse, comparable à celle des girafes, nous laisse sans voix.

Quelques hommes s’agitent, la fête va commencer. Ils se suivent en file indienne et ils m’invitent à y participer. La mama me met un collier de perles, je les suis. Ils se mettent à pousser des cris rauques, les femmes chantent d’une voix aigüe, quelles sensations ! Inexplicable… Je réalise à ce moment-là que j’ai la chance de vivre un moment très particulier. Les 2 fils du chef Massaï, qui nous a malheureusement quittés il y a plus d’un an, sont en tête de la file indienne et dirigent toute la troupe. Ils se mettent ensuite en cercle, Jacqueline et moi faisons partie de la cérémonie et dansons avec eux. Génial !  Moment inoubliable. Ces voix et ces grands hommes sautant devant nous, c’était mon rêve et je remercie mes amis Massaïs pour nous avoir fait vivre ce moment si particulier.

Jeudi 8 Mars : Le temps passe trop vite, nous repartons demain… Chacun d’entre nous essaie de passer le plus de temps possible avec les enfants. Je passe aussi un moment sur une natte sous le baobab avec la Mama et Emma et nous parlons de nos différences culturelles. Les Africains ont du mal à comprendre les comportements individualistes des Européens. Pourquoi ne sommes-nous pas libres d’entrer chez quelqu’un sans y être invités ? Pourquoi seulement notre famille et amis proches sont conviés lors de cérémonies et pas les habitants de notre village ? Pour eux, le partage est une chose normale. Tout le monde est soudé… N’importe qui sera le bienvenu dans leur maison et un repas lui sera servi même s’il n’y en a pas assez pour tout le monde. Il y a un gouffre entre nos 2 cultures, c’est certain. Et pour être capable d’accepter cette différence, sans jugement, il faut avoir un esprit ouvert. Certains ont un complexe de supériorité, injustifié, virant à la paranoïa, d’où la haine de ce qui est différent. L’Afrique est telle qu’elle est, pauvre mais accueillante par-dessous tout. On aime l’Afrique ou on ne l’aime pas. Lorsque l’on vient en Afrique on se prépare en amont, on se renseigne sur les us et coutumes du peuple qui va nous recevoir pour les comprendre et les intégrer…

Vendredi Mars : Dernière matinée à  l’école avant de repartir pour Dar es Salaam. Nous retournons à l’école et essayons de profiter au maximum des dernières heures avec les enfants… Nous leur distribuons des chamallows qu’ils ne connaissaient pas. Ils en raffolent. Le temps passe vite, Emma doit sceller la cloche dans le bureau avant que l’on parte, j’y tiens… Il la fait retentir, c’est pour nous le moment de nous dire au revoir. Les adultes versent leurs larmes, nous nous embrassons, l’émotion est très forte, des liens se sont tissés, difficile de monter dans le taxi et de partir. Mon chouchou se tient en retrait contre un arbre, nous nous regardons jusqu’à n’en plus finir… Je lui ai promis que je reviendrai très vite…

 

Petit clin d’oeil à Lillian Robinson, rencontrée à Dar es Salaam et qui nous a permis d’utiliser une de ses chansons pour notre vidéo.